PER, PEE : deux approches complémentaires

Le paysage de l’épargne de long terme a été rationalisé par la loi Pacte avec la création du PER (plan épargne retraite). Quelles différences avec le PEE (plan épargne entreprise) ? En quoi ces deux enveloppes sont-elles complémentaires ? L’essentiel à savoir.

La loi Pacte du 22 mai 2019 a profondément re­manié l’épargne de long terme, en réformant marginalement l’assurance vie, substantiellement le PEA (plan d’épargne en actions) et en profondeur l’épargne retraite. Une remise à plat symbolisée par la création du PER (plan épargne retraite) en remplacement d’une kyrielle de dispositifs qui ne seront plus commercialisables à partir du 1er octobre pro­chain, comme le Perp, le contrat Madelin ou l’article 83. Le législateur en a profité pour instaurer des passerelles entre épargne salariale et épargne re­traite, entre PEE (plan d’épargne en entreprise) et PER d’entreprise collectif (PERCOL).

Fait notable, les flux issus de l’épargne salariale, principale source d’alimentation des PEE et PER d’entreprise collectif, ont bénéficié d’un allègement de charges majeur parallèlement à la loi Pacte. La suppression totale au 1er janvier 2019 du forfait so­cial (prélèvement à la charge de l’employeur) a été décidée pour toutes les entreprises de moins de 50 salariés sur toutes les sommes versées (prime d’intéressement, participation et abondement de l’employeur).

Pour les entreprises de 50 à moins de 250 salariés, le forfait social est supprimé spécifiquement sur l’intéressement. Avec l’abrogation du forfait social, auparavant fixé à 20% dans ces situations, le coût de l’épargne salariale est redevenu singulièrement compétitif par rapport aux rémunérations salariales.

 

PEE POUR LE MOYEN TERME, PER POUR LA RETRAITE

Pourquoi s’intéresser simultanément au PEE et au PER ? Ce sont deux dispositifs d’épargne complé­mentaires. Le PEE est accessible uniquement dans le cadre de l’entreprise, c’est un dispositif d’épargne salariale. La loi prévoit un blocage des sommes ver­sées sur un PEE pendant 5 ans (article L3332-25 du Code du travail), ce qui permet de constituer une épargne disponible à moyen terme. De son côté, le PER est accessible à la fois à titre individuel, ou à titre collectif dans le cadre de l’entreprise : c’est un dispositif d’épargne salariale et d’épargne retraite. Le PER est, en principe, indisponible jusqu’au départ à la retraite, ce qui en fait un véhicule d’épargne de long terme. PEE et PER bénéficient tous deux de pos­sibilités de déblocage anticipé qui ne couvrent pas exactement les mêmes cas(voir ci-après).

S’il n’existe qu’un seul type de PEE(lePEG et le PEI ne sont que des déclinaisons du PEE dans le cadre d’un groupe d’entreprises et dans un cadre interentre­prises respectivement),il existe trois types de PER :

  • PER individuel, aussi appelé PERin
  • PER d’entreprise collectif facultatif, aussi appelé PERECO ou PERCOL
  • PER d’entreprise collectif ou catégoriel obliga­toire, appelé PERO ou PERCAT

Si les différents types de PER sont soumis à cer­taines règles communes, leur fonctionnement respectif diffère, tant en termes d’alimentation que de possibilités de déblocage et de fiscalité. Chaque PER dispose de trois compartiments, correspondant chacun à un mode d’alimentation (et à des règles, notamment fiscales, associées) : le compartiment 1 pour les versements volontaires, le compartiment 2 pour les flux issus de l’épargne salariale (participa­tion, intéressement, abondement de l’employeur) et le compartiment 3 pour les versements obligatoires.

Lorsqu’ils sont sous­crits et alimentés dans le cadre collectif de l’entreprise, PEE et PER répondent à des objectifs conjoints et complémentaires :

  • optimisation de la rémunération (fiscalité moindre qu’un salaire) pour le PEE et le PER collectif
  • motivation et fidélisation des salariés pour le PEE et le PER collectif
  • retraite complémentaire pour le PER collectif
  • optimisation de la fiscalité pour les versements volontaires déductibles sur un PER
  • aide à la constitution d’un apport personnel pour l’achat de la résidence principale (cas de déblocage anticipé) pour lePEE, le PER d’entreprise collectif facultatif et le PER individuel

L’adhésion à un PEE s’effectue uniquement dans le cadre collectif de l’entreprise : c’est forcément l’entreprise qui procède à l’ouverture du PEE. Dès lors qu’un PEE est ou­ vert, tout salarié y a droit.

De son côté, le PER peut quant à lui être souscrit à titre individuel dans le cadre d’un projet personnel de constitution d’une épargne retraite (PER individuel) ou dans le cadre collectif de l’entreprise (PERCOL ou PERO/PERCAT).

 

ALIMENTER SON PEE OU SON PER

Les versements volontaires sont le seul mode d’alimen­tation d’un PER individuel avec les transferts entrants. De leur côté, PEE et PER d’entreprise collectifs (PERCOL) sont tous deux alimentés par les versements volontaires du salarié, ainsi que les flux d’épargne salariale : partici­pation des salariés aux bénéfices, prime d’intéressement, abondement de l’employeur, droits inscrits au Compte épargne temps (CET) ou monétisation de jours de repos non pris (en l’absence de CET). Les PER collectifs obligatoires sont alimentés par les cotisations obligatoires de l’employeur et du salarié, mais également par des versements volontaires des salariés adhérents appelés versements individuels facultatifs (VIF).
Chaque versement est bloqué (sauf cas de déblocage anti­cipé) pendant 5ans sur un PEE et jusqu’à l’âge de la retraite sur un PER.

Les versements à titre personnel sur un PEE sont limités. Le plafond de versements est égal :

  • à 25% de la rémunération annuelle brute d’un salarié
  • à 25% du revenu d’activité de l’année N d’un gérant majoritaire de SARL, gérant associé commandité de SCA ou tout autre chef d’en­treprise ayant une rémunération imposable selon les dispositions de l’article 62 du CGI (code général des impôts)
  • à 25% du revenu d’activité de l’année N-1 d’un travailleur indépendant (revenus de type BIC, BNC)

Les versements sur un PER, quel que soit son type (individuel ou collectif), ne sont pas limités en montant. Les seuls plafonds en vigueur correspondent à une limite de déductibilité, lorsque le titulaire du plan opte pour les versements volon­taires déductibles.

 

CAS DE DÉBLOCAGE ANTICIPÉ DU PEE ET DU PER

Le déblocage anticipé permet de sortir d’un PEE ou d’un PER avant la fin de la période d’in­ disponibilité de l’épargne prévue par la loi (5 ans pour le PEE, âge de la retraite pour le PER). Plusieurs cas de déblocage anticipé sont prévus par les textes, certains sont communs au PEE comme et au PER, d’autres sont spécifiques.

Le tableau récapitulatif ci-dessous permet de visua­liser les différents cas de déblocage anticipés ap­plicables au PEE et aux différents types de PER :

 

TRANSFERTS : QUELLES POSSIBILITÉS POUR LE PEE ET LE PER ?

Le transfert des droits acquis est possible dans le cadre d’un PEE et d’un PER. Cependant, tout transfert d’un PEE vers un PER ou inversement est impossible. En revanche, le transfert des droits individuels issus d’un PEE alimenté par un ancien employeur vers le PEE d’un nouvel employeur est possible. De même, le transfert d’un PER vers un autre PER est possible, quelle que soit le type de PER. Enfin, le transfert des droits acquis au travers d’anciennes enveloppes d’épargne retraite vers un PER est également autorisé.

En cas de transfert des droits issus d’un Perec ou de cotisations obligatoires sur un article 83 vers un PER individuel, les versements sur le compartiment 2 (collectif) et le compartiment 3 (versements obligatoires) ne sont pas autorisés. Ce cloisonnement entre compartiments vise à ap­pliquer des règles spécifiques (modalités de sortie anticipée ou au terme, fiscalité} à chacun de ces compartiments.

Important : le transfert d’un article 83 vers un PERP effectué avant le 1er octobre 2020, suivi d’un transfert vers un PER individuel permet d’échapper à l’une des contraintes majeures de l’article 83, la sortie obligatoire en rente. Une fois ces transferts opérés, le titulaire gagne en liberté puisqu’il peut sortir en capital (en une ou plusieurs fois) ou partiellement en rente. Cerise sur le gâteau, il bénéficie du cas de déblocage anticipé pour acquisition de la résidence principale, qui n’existe pas pour le PER obligatoire (successeur de l’article 83).

 

Article issu du Mag 3AO n°56 de juin 2020