Placements : investir sans stress avec les versements programmés
Ce dispositif permet d’investir régulièrement et de lisser ses points d’entrée sur les marchés. Une méthode particulièrement rassurante lorsque les valorisations sont élevées et l’horizon incertain. La pratique se développe aussi chez les fournisseurs de SCPI.
La Bourse attire de nouveaux investisseurs ! Quelque 70.000 boursicoteurs néophytes sont venus sur les marchés au premier trimestre 2021. selon l’Autorité des marchés financiers (AMF), après plus de 400.000 en 2020. En parallèle, la part des unités de compte souscrites dans le cadre de l’assurance vie ne cesse de croître. Depuis le début de l’année, elle s’établit à 37 % des cotisations, selon la Fédération française de l’assurance (FFA), qui précise que plus de la moitié des unités de comptes sont investies en actions.
Or, ces « primo-accédants » aux marchés ont tendance à être plus jeunes et moins bien formés à la Bourse, ce qui peut les conduire à des erreurs dans leurs décisions d’achat ou de vente. Car l’épargnant est bien souvent son pire ennemi, lorsqu’il s’agit de gérer le calendrier de ses investissements en Bourse. Piloter son portefeuille en fonction des anticipations de hausse et de baisse des cours, c’est ce que l’on appelle le « market timing ». Et le résultat est généralement déplorable.
« L’investissement progressif constitue une bonne méthode pour épargner régulièrement, sans effort et sans avoir à y penser ».
Les particuliers ont, en effet, tendance à acheter au plus haut et à vendre au plus bas. Les chiffres de la FFA sont d’ailleurs éloquents, puisqu’ils montrent une forte corrélation entre les versements en uni tés de compte et l’évolution du CAC 40. Dans son étude « Mind the gap », Morningstar a recalculé les performances des fonds commercialisés en Europe en tenant compte des flux d’entrée et de sortie sur ces supports. Ces mouvements ont dégradé les performances de plus d’un demi-point par an sur la période 2010-2018…
DES VIREMENTS AUTOMATIQUES POUR ÉPARGNER SANS EFFORT
Pour éviter ces biais, il est possible de recourir aux versements programmés. Cela permet de verser tous les mois ou tous les trimestres une somme d’argent identique, fixée selon le budget de chacun. Les versements programmés ont de nombreux atouts. Tout d’abord, il s’agit d’une bonne méthode pour épargner régulièrement, sans effort et sans avoir à y penser. À long terme, cette discipline peut d’ailleurs permettre de mettre davantage de côté. La plupart des dispositifs de versements programmés sont cependant d’une grande souplesse : ils ne prévoient pas de période d’engagement, et il est possible d’interrompre les prélèvements ou de modifier les montants à la hausse comme à la baisse sans délai.
Ils permettent, en outre, de lisser ses points d’entrée en Bourse. Au lieu de placer 1.000 euros sur les marchés en une seule fois à une date aléatoire, 100 euros seront investis sur dix dates étalées dans le temps. C’est particulièrement pertinent lorsque les valorisations sont élevées, ceci pouvant d’ailleurs être un frein à l’investissement. En effet, en cas de pronostic baissier sur les cours, mieux vaut étaler ses achats dans le temps. D’autant que ce mode d’investissement permet naturellement d’acheter davantage quand les marchés sont bas et moins lorsqu’ils sont hauts. En effet, à montant constant, il sera possible d’acquérir moins de parts de fonds quand les marchés sont élevés que lorsqu’ils sont moins bien valorisés.
UNE MÉTHODE D’INVESTISSEMENT, PAS UNE MARTINGALE
L’investissement progressif n’est en rien une martingale pour autant. Certains déplorent d’ailleurs qu’elle maintient les épargnants en dehors du marché – au lieu d’investir en une fois, l’investissement est étalé dans le temps – ce qui détruirait de la performance. Mais, a contrario, elle permet aux ménages dotés d’une capacité d’épargne modeste de rentrer plus rapidement sur les marchés que s’ils attendaient d’avoir accumulé un montant jugé suffisant pour déclencher une démarche d’investissement. Ensuite, tout dépend du comportement des marchés. En outre, la mise en place de versements programmés n’empêche en rien de réaliser des versements complémentaires, plus opportunistes.
Cette option s’est largement diffusée dans l’assurance vie et dans les plans d’épargne retraite (PER), avec des montants minimum généralement très faibles (à partir de 30 euros par mois chez certains acteurs mutualistes) et sans frais. Seul bémol : tous les supports ne sont pas éligibles aux versements programmés. C’est, par exemple, le cas des produits de campagne, comme les produits structurés. D’autres unités de compte n’acceptent usuellement pas les versements programmés, comme les sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) ou les fonds de private equity. Le dispositif est également pertinent dans le cadre du plan d’épargne en actions (PEA) ou d’un compte titres. Même s’il est moins fréquent, il est souvent proposé chez les principales banques françaises.
Vigilance sur les actions fractionnées
Depuis quelques mois, des courtiers en ligne proposent d’investir en direct sur des fractions d’actions, donnant ainsi facilement accès à des titres dont le cours est élevé, à l’image d’Amazon qui cote autour des 3.500 dollars. La fintech allemande Trade Republic, arrivée en France au début de l’année, en a fait l’une de ses offres phares. Ses plans d’investissement programmés, démarrant à 10 euros, permettent de miser sur des milliers d’ETF et d’actions internationales. L’idée « a de quoi séduire », selon l’AMF. Le régulateur alerte toutefois sur le fait que derrière cette appellation se cachent des offres très diverses, et appelle à s’interroger sur la nature exacte du produit souscrit. S’il s’agit réellement de fractions d’actions, l’AMF invite à étudier les règles de regroupement pour former des actions entières et les droits qui y sont attachés. Trade Republic précise, par exemple, que les détenteurs de fractions d’actions sont éligibles aux dividendes. Mais il est aussi possible d’être face à des produits plus complexes, tels que des dérivés adossés à un sous-jacent actions. Dans ce cas, le client n’est pas détenteur de l’action, mais seulement de l’instrument financier répliquant sa performance. Il est, en outre, exposé au risque de la contre partie ayant émis le dérivé.
Des SCPI à partir de quelques dizaines d’euros par mois
Les SCPI permettent d’investir dans de l’immobilier locatif, généralement d’entreprise, avec un ticket d’entrée très faible. Quelques milliers d’euros suffisent la plupart du temps. Mais pour conquérir de nouveaux clients, certaines sociétés de gestion immobilière développent des programmes d’investissement avec des versements programmés. Ces derniers peuvent prendre plusieurs formes.
Cas de figure le plus répandu, le client doit acheter au minimum une part de SCPI à chaque versement (de 150 à plus de 1.000 euros la part selon la SCPI choisie) et il acquiert un nombre de parts défini à l’avance de manière étalée dans le temps. C’est, par exemple, ce que propose Primonial REIM sur ses SCPI, avec l’obligation par ailleurs de détenir préalablement au moins dix parts du support sélectionné. Perial AM a également choisi cette voie.
Autre option : acquérir des fractions de parts, ce qui autorise des versements programmés de montants plus faibles. C’est le cas chez Corum AM, qui propose des versements à partir de 50 euros, sous condition de détenir une part de la SCPI ciblée. La société de gestion a décimalisé les parts de ses SCPI pour ce faire. Les capitaux peuvent donc être investis directement dans la SCPI et bénéficier de son rendement, une fois le délai de jouissance écoulé. Inter Gestion le permet aussi sur sa SCPI Cristal Rente, Alderan sur Activimmo.
La Française REM vient de son côté de lancer le service Agil’lmmo, déclinée depuis mars sur sa plateforme en ligne Moniwan. Après la souscription d’une part pleine, l’épargnant peut opter pour des versements réguliers (à un rythme mensuel, bimestriel, trimestriel ou semestriel) à partir de quelques dizaines d’euros selon le prix de part de la SCPI choisie. En revanche, la société impose une durée d’engagement d’un an minimum et il faut attendre que les versements cumulés atteignent la valeur d’une part de la SCPI souscrite pour que cette dernière soit attribuée à l’investisseur. Mais La Française a prévu une rémunération des fractions de part. En attendant que la part soit reconstituée, les montants versés sont rémunérés dès le premier euro à 85% du taux de rendement de l’année passée. ■
Article issu du Mag 3AO n°69 de juillet 2021